Il y a toujours un aspect étourdissant à entendre Yoann Richomme quelques instants après avoir franchi la ligne d’arrivée. Si l’organisme a été soumis à rude épreuve, comme le bateau, le skipper fait toujours preuve d’une lucidité impressionnante, un recul si loin de la bataille qu’il vient de mener. Ça a été le cas ce lundi soir après avoir franchi la ligne de la Rolex Fastnet Race aux côtés de Yann Eliès. « On est très heureux de cette course, de ce résultat même si on aurait préféré terminer 4 minutes plus tôt », explique-t-il, sourire aux lèvres. Le marin évoque « une édition à être aux avant-postes quasiment tout le temps », le fait de « ne pas avoir beaucoup de déchets sur la navigation » et « la satisfaction de la copie rendue ».
Un départ « intense et impressionnant »
« Bien sûr, on aurait aimé terminer une poignée de minutes plus tôt et l’emporter. Mais il n’y a pas de déception à avoir ». Et avant de décrypter sa course, le skipper de Paprec Arkéa a tenu à féliciter ses rivaux du moment, Charlie Dalin et Pascal Bidegorry (Macif). « Ils ont été plus forts que nous sur la fin et ils ont super bien navigués ». Yoann s’amuse : « ça fait dix ans que je fais des bras de fer en mer avec Charlie, j’avais presque perdu le goût de tout ça ».
Ce duel à couteaux tirés ne fait pas oublier l’essentiel : la nécessité pour Paprec Arkéa et ses deux skippers d’emmagasiner des automatismes, des réflexes et des enseignements à bord de leur bateau mis à l’eau en février dernier. Et en la matière, cette course a été particulièrement enrichissante. Les premières heures ont fait office de test grandeur nature face à une mer formée, des vents à plus de 30 nœuds et l’impression d’un chaos indescriptible. « C’était super intense et impressionnant, le bateau rebondissait sur des vagues de 2 à 3 mètres. Il y avait un risque de casse permanente », reconnaît Yoann.
« Le bateau est bien né, il est solide, marin »
Pourtant, sans rien lâcher et en « faisant le dos rond », le binôme s’en est sorti en menant la flotte. « Paprec Arkéa, c’est un bateau qui aime bien le gros temps et les vagues, il est fait pour ça », sourit Yoann. En s’offrant le luxe de remonter en tête la mer d’Irlande avant de franchir le rocher du Fastnet en tête de tous les monocoques engagés . « Le bateau volait, ça restera mon meilleur souvenir de cette course ». Un moment à part, suspendu, récompense joyeuse de tant d’efforts et de résistance que les deux hommes ont savourée. La suite, c’est la descente vers Cherbourg, ce duel avec Macif et cette arrivée en mode Solitaire du Figaro. « C’était un super match et le bateau a tenu », s’enthousiasme Yann Eliès. On s’est très bien entendu, nos prises de décisions étaient limpides. Nous avons bien trouvé notre mode de fonctionnement ! »
Dans le rang des réflexions, il y a l’idée d’après Yoann de « réfléchir à optimiser l’ergonomie » lorsque « la vie à bord est dure ou violente ». Côté satisfaction, le duo comme l’équipe a fait le plein de confiance. « Le bateau est bien né, il est solide, marin. On commence à avoir des repères au portant, ce qui sera très précieux pour la Transat Jacques Vabre ». Et il ajoute : « c’est génial de le voir réagir comme on le souhaite, d’arriver à le comprendre, de savoir avec exactitude comment optimiser le réglage des foils et des voiles. » Une certitude demeure : Yoann, Yann sont déjà prêts à relever le challenge de la fameuse transatlantique, le point d’orgue de la saison.